Depuis quelques années, nous sommes régulièrement interpellés par les professionnels du secteur social et médico-social qui expriment un réel malaise, face à la prise en charge de la souffrance psycho-sociale, ou du trouble psychique de l’usager exprimé de façon plus ou moins manifeste. La psychiatrie et la prise en compte des malades ont considérablement évolué depuis des décennies : l’hospitalisation n’est plus la règle mais l’exception. Ainsi en dehors des périodes de crise ou de mise en danger, les malades doivent trouver leur place dans la cité. Ces situations, jugées plus fréquentes, confrontent le professionnel à des difficultés de mise en œuvre d’outils d’intervention voire à une remise en cause de leurs propres compétences. Ainsi, les pathologies mentales, lorsqu’elles sont trop aiguës ou trop invalidantes viennent impacter la relation d’aide pouvant conduire à une impasse dans le lien. Ils génèrent chez les professionnels des sentiments divers, comme celui d’impuissance, d’épuisement voire d’insécurité face à l’étrangeté de l’autre. Dans le même temps, on demande au secteur psychiatrique, non plus de soigner les malades, mais d’apaiser un corps social en souffrance. Cette évolution se faisant « au détriment des vrais fous » : c’est un paradoxe terrible : « Tout le monde a son psy, sauf les fous, vu l’état d’abandon de la psychiatrie publique » Dr Zagury, Chef de service psychiatrique du Bois de Bondy. La psychologisation fortement à l’œuvre dans notre société, dans la sphère familiale, professionnelle, éducative, sociale, vient « flouter » les délimitations entre les situations de mal être psychologique, de mal être social et celles de véritables maladies mentales. Tout cela donne au final une image déformée de la psyché et des interventions en matière de santé mentale. En conséquence, la souffrance psychique, à l’interface des champs de la santé et du social, dans son actuellgénéralisation devient un enjeu majeur de société. Le travail social comme la psychiatrie doivent s’adapter à de nouvelles pathologies entre social et santé. Ces deux secteurs doivent conjuguer leurs interventions pour englober les besoins des personnes dans leurs dimensions psychique, sociale, familiale et professionnelle. Cette journée destinée à un public large d’étudiants, de professionnels des champs sanitaire et social, tentera d’apporter des éclaircissements sur l’approche sociétale de la souffrance et des troubles mentaux, et de définir ce que peut être une clinique psycho-sociale à la croisée de la santé mentale et du lien social.